Aller au contenu

Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/38

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

saient. Nous avions mis Quatre-vingt-treize en drame et nous montions l’un après l’autre les degrés de notre échafaud où l’on se plaçait en criant : Vive la République !

Le public était représenté par ma cousine Mathilde, et quelquefois par la gent emplumée qui faisait la roue ou picorait et gloussait.

Nous cherchions dans les annales des cruautés humaines. L’échafaud de fascines devenait le bûcher de Jean Huss ; plus loin encore, la tour en feu des Bagaudes, etc.

Comme nous montions un jour sur notre échafaud en chantant, mon grand-père nous fit observer qu’il valait mieux y monter en silence et faire au sommet l’affirmation du principe pour lequel on mourait ; c’est ce que nous faisions après.

Nos jeux n’étaient pas toujours aussi graves : il y avait, par exemple, la grande chasse, où, les porcs nous servant de sangliers, nous allumions des balais pour servir de flambeaux et nous courions avec les chiens au bruit épouvantable de cornes de berger que nous appelions des trompes de chasse ; un vieux garde nous avait appris à sonner je ne sais quoi qu’il appelait l’hallali.

Il paraît que les règles de la vénerie étaient observées dans ces poursuites échevelées qui se terminaient en reconduisant, bon gré, mal gré,