Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/81

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Millières, où un piano servait d’orgue, chanté ensemble les soirs de printemps ; j’y fus un peu organiste, jusqu’à mon départ pour Paris, en 1855 ou 1856 ; Julie, à cette époque avait la voix du rossignol de nos forêts. — Deux institutions, ne tirant que d’elles-mêmes leurs ressources, ne pouvaient guère subsister l’une près de l’autre dans ce pays, sans se réunir ; c’est ce que nous fîmes, Julie et moi. Mais toujours je songeais à Paris, j’y partis la première ; elle vint me retrouver chez Mme Vollier, 14, rue du Château-d’Eau.

Ma mère, à partir de cet instant jusqu’à la mort de sa mère, habita, à Vroncourt, cette maison sur la montée auprès du cimetière dont je dois avoir parlé.

De là, on entendait le vent dans les sapins qu’ombrageaient nos chères tombes ; on en voyait les cimes, lourdes de neige, pendant l’hiver.

Nulle part, je ne vis si longue que dans la Haute-Marne la saison des frimas ; jamais je n’ai senti, à part dans les mers Polaires, un froid plus âpre.

Je souffris beaucoup en laissant seules ma mère et ma grand-mère, mais l’espérance de leur faire un avenir heureux ne m’avait pas encore abandonnée ; j’en devais conserver longtemps l’illusion.