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Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/86

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Amis, il fait bon sous les chênes ;
Les chênes gardent le serment
Ou des amours ou bien des haines,
Sous les guis aux gouttes de sang.


Telle était ma pensée, telle elle est encore dans les calamités telles que les tyrannies qui écrasent les peuples comme le grain sous la meule. On a bien assez des tortures des pauvres mères, sans multiplier par le mariage les liens de famille ; oui, il faut alors n’être que des combattants !

Il est vrai qu’il m’était possible de penser ainsi, puisque ceux qui m’avaient demandée en mariage m’auraient été aussi chers comme frères que je les trouvais impossibles comme maris ; dire pourquoi, je n’en sais vraiment rien ; comme toutes les femmes je plaçais mon rêve très haut et, outre la nécessité de rester libre pour l’époque de la lutte suprême, j’ai toujours regardé comme une prostitution une union sans amour.

Pendant cinq ans encore, on la crut venue cette lutte suprême. Il fallut que Sedan s’ajoutât aux autres crimes pour faire déborder la coupe. On attend toujours que la coupe déborde comme un océan, par la même raison que l’on ne s’émeut jamais des malheurs tant qu’on pourrait les empêcher.