Page:Mémoires de l'Institut national de France (tome 34, partie 2 - 1895).djvu/156

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pairs au sacre du roi et soutenir même la couronne au-dessus de la tête du prince[1] ; c’est à ce moment que le roi invita une femme, pairesse, à venir siéger en personne au parlement avec les pairs évêques et les pairs laïques, afin de trancher, de concert avec eux, un différend où le comte de Flandre était partie[2] (avril 1317). Philippe, à cette même date, entretenait ses peuples d’un projet de croisade[3] : ne cherchait-il point par là à donner à l’esprit public un aîiment nouveau ? Mais ni ces audaces ni ces habiletés n’eurent entièrement raison de l’opinion : quelques semaines plus tard, cette pairesse, la mère de la reine, était poursuivie au criminel. Avons-nous vu en 1892-1893, en cette année si mystérieuse et si émouvante, l’opinion beaucoup plus puissante et s’imposant beaucoup plus efficacement au pouvoir ?

Philippe V dit le Long mourut en 1322[4]. Il laissait lui-même plusieurs filles. Charles IV[5] le Bel, frère de Philippe,

  1. « De quo aliqui indignati fuerunt. » (Continuateur de Nangis, édit. Géraud, t. I, p. 432.)
  2. Leibnitz, Codex juris gentium diplomaticus, p. 97, 98, no 46.
  3. Hervieu, Recherches sur les premiers états généraux, p. 133.
  4. Le 3 janvier 1322 (n. s.). (Géraud, Continuatio Chronici G. de Nangiaco, t. I, p. 38.)
  5. Il y a une erreur de numérotage dans la liste définitivement reçue des rois du nom de Charles. Charles IV le Bel devrait s’appeler Charles V. L’erreur, qui remonte loin, car, de son vivant, Charles V était déjà qualifié Charles Quint de ce nom (Bibl. nat., ms. fr. 204, fol. 1 ro), se continue jusqu’au dernier roi de ce nom, Charles X, qui aurait dû s’appeler Charles XI. Voir Gabriel Peignot, Lettre sur les rois de France qui ont porté le nom de Charles, dans G. Peignot, Opuscules, Paris, 1863, p. 65-67. Les numéros d’ordre auxquels nous sommes habitués pour les rois du nom de Louis n’ont pas toujours prévalu. On commença par oublier un Louis, comme on avait oublié un Charles ; mais l’erreur fut ensuite corrigée. Au XVe siècle, on comptait un Louis de moins qu’aujourd’hui. Louis XI était pour ses contemporains, ou au moins pour plusieurs d’entre eux, Louis X. Voir, à ce sujet, le très exact et très érudit auteur d’un petit traité manuscrit composé en 1471 et conservé à la Bibliothèque nationale (ms. fr. 25159). Cet écrivain appelle Louis VIII Louis VII et Louis XI Louis X. N’est-ce pas précisément vers le temps de Louis XI que le numérotage auquel nous sommes accoutumés s’est introduit ? À la table d’un manuscrit du Rosier