de la réalité, elle n’est pas première dans l’ordre de la connaissance ; il y a pour l’atteindre une route à suivre et des degrès à franchir. Mais il y a des vérités qui sont entourées d’une évidence immédiate ; pour celles-là, il faut se garder d’en chercher la preuve, premièrement parce qu’on en n’a pas besoin, secondement parce qu’on ne la trouverait pas. Loin qu’il faille nous affliger de notre impuissance à les démontrer, et y voir une marque de la faiblesse de notre esprit, il faut nous en féliciter et y reconnaître un signe de sa force, et une analogie de l’intelligence humaine avec l’intelligence divine qui saisit toutes les vérités comme nous en saisissons quelques-unes, par une intuition immédiate. Il faut comprendre surtout ce qu’a dit très-profondément Aristote, que si tout pouvait être prouvé, rien ne le serait ; car si haut qu’on remontât dans la démonstration, la proposition qu’on atteindrait serait, à la vérité, principe à l’égard de celles qui en découlent, mais elle ne serait à l’égard de celles qui la précèdent qu’une conséquence ayant elle-même besoin de démonstration ; et ainsi on remonterait à l’infini sans jamais atteindre une certitude où l’on pût se reposer en paix, à moins qu’on ne voulût tourner dans un cercle ridicule et prouver une proposition par les conséquences mêmes qu’on en a tirées et qui lui empruntent toutes leur valeur.
La seconde maladresse serait d’argumenter, au sens propre du mot, contre le scepticisme, et d’accepter