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de m. messier.

servations qu’elles lui ont fournies, mais qui pourrait même estimer le nombre des nuits qu’il a passées en recherches inutiles ? Ce que nous pouvons dire, c’est que pendant sa longue carrière il n’a négligé aucune opposition, aucune conjonction de planètes, aucune éclipse d’aucun genre. On lui doit sur-tout un nombre considérable d’éclipses des satellites de Jupiter, et comme il avait une vue excellente et une excellente lunette, il voyait presque toujours les immersions plus tard et les émersions plus tôt que tous les autres astronomes.

La suite non interrompue des observations de M. Messier nous a entraînés ; rétrogradons un peu pour voir les avantages qu’il en avait retirés. En 1755 ce qu’il appelle son avancement se bornait encore à un traitement de 500 livres avec le titre modeste de commis de la marine. Il avait de plus la table de Delisle ; mais le vieil astronome, dégoûté peut-être par les désagrémens que lui avait attirés sa conduite inexplicable, en 1759, avait quitté l’astronomie. Devenu veuf, tout entier à des œuvres de dévotion et de charité, il avait fait connaissance avec une femme qui se disait fille d’Achmet III, sultan de Constantinople, et dont les mémoires sont imprimés. Elle s’était fait présenter à Delisle en prétextant avec lui une conformité de goûts et de sentimens. Elle gagna son entière confiance, l’attira chez elle ; Delisle ne pouvait plus s’en séparer ; il rompit son ménage pour aller chaque jour prendre ses repas avec elle, en sorte que Messier eut l’inquiétude assez bien fondée de perdre une ressource qui lui était strictement nécessaire. Nous avons eu entre les mains une lettre de la princesse ottomane, qui lui annonçait que Delisle, en considération de son zèle et de ses