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éloge de m. delambre.

consiste dans l’application effective d’une mesure de platine qui est à-la-fois une règle et un thermomètre.

Nous n’avons parlé jusqu’ici que des difficultés propres aux opérations géodésiques ; mais les auteurs de ce grand travail furent souvent arrêtés par des obstacles d’un autre genre. Leur carrière fut troublée par de vives inquiétudes, par l’injustice et la douleur. Méchain qui nous a laissé un grand nombre d’observations précieuses, eut à supporter une assez longue captivité, et les suites douloureuses de fatigues sans cesse renouvelées. L’opération principale étant achevée, il désira, comme il en avait toujours eu le dessein, de la prolonger jusqu’aux îles Baléares, et mourut sur une terre étrangère, avant que les résultats de ses pénibles travaux eussent été rendus publics. Delambre à qui il fut donné de prendre une part beaucoup plus étendue à cette entreprise, en a rassemblé tous les éléments, et les a publiés dans un ouvrage capital que l’on doit regarder comme un des plus beaux monumens des sciences. Il avait quitté Paris dans les derniers jours du mois de juin 1792. Il est facile de juger combien l’état politique où la France se trouvait alors, et les passions violentes qui agitaient toutes les parties du royaume, étaient peu favorables à une entreprise savante dont les hommes éclairés appréciaient seuls les avantages.

Mes dispositions qu’il était nécessaire de faire pendant la nuit, l’emploi des signaux et d’instruments inconnus firent naître des soupçons ; les habitants des villages s’attroupèrent : on interrogea les astronomes, on voulut connaître les instructions qui leur avaient été remises, et elles parurent cacher quelque mystère coupable. M. Delambre, toujours persuadé la bonne foi, la patience et le désir d’être utile devaient