comme rigoureusement vrais, pour en faire les applications que lui suggère son imagination. Cette branche de la Physique mathématique n’est pas très en honneur auprès de certains physiciens de laboratoire.
Je me souviens qu’il y a bien longtemps, l’un d’eux m’interrogeant sur mes travaux, je lui répondis que j’étudiais la belle solution donnée par Lamé pour le problème de la distribution de la chaleur à l’intérieur d’un ellipsoïde. « Eh quoi ! me dit-il, vous vous imaginez que, nous autres physiciens, s’il nous prend envie de vérifier les lois de la propagation de la chaleur, nous allons nous amuser à prendre un corps aussi compliqué que votre ellipsoïde. Nous nous en garderons bien. Une bonne plaque parallélépipédique fera bien mieux notre affaire, et nous permettra de nous passer de tous vos calculs ». Je gardai le silence ; j’aurais pu toutefois lui répondre qu’il serait peut-être, à l’avenir, conduit à construire un appareil délicat de Physique dans lequel figurerait un ellipsoïde dont les diverses parties seraient à des températures différentes. J’aurais pu lui rappeler aussi l’argument classique tiré de la théorie des sections coniques, qui ont été étudiées pendant tant de siècles pour l’amour de l’art, avant d’intervenir dans les lois de Képler.
Le physicien, dont je viens de parler, était pourtant un excellent esprit qui, dans tous ses travaux, a fait l’usage le plus habile des méthodes géométriques. Il comprenait mieux que personne l’utilité qu’il y a pour l’expérimentateur à avoir auprès de lui un mathématicien, un conseiller discret, pour l’aider à interpréter ses expériences et à démêler les résultats, souvent très complexes, qu’elles fournissent.
Jamais ce rôle de conseiller et de critique n’a pu être plus utile qu’en ce moment où la Physique expérimentale traverse une crise profonde dans laquelle viennent sombrer les principes qui paraissaient le mieux établis. Nous sommes loin des atomes insécables d’Épicure et de Lucrèce ; et nos théories modernes n’ont rien trouvé de mieux que