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DE M. LE COMTE BERTHOLLET.

de l’air vital avec les corps : la chaleur qui se manifeste dans ces opérations est celle qui auparavant, combinée avec cet air vital, le maintenait à l’état élastique. » Telles furent les deux pierres fondamentales d’un édifice auquel ces dernières années ont seules commencé à faire quelques brèches.

Mais dans les sciences il n’existe d’autorité que la conviction individuelle, et il faut toujours beaucoup de temps pour que la vérité la plus sensible déplace les préventions enracinées par l’habitude. Pendant plusieurs années encore, Lavoisier fut seul de son avis, et nous en avons des preuves remarquables dans les rapports mêmes qu’il fit à l’Académie sur les premiers Mémoires que lui présenta M. Berthollet[1]. Le jeune chimiste n’y avait suivi que ses propres idées, comme il le fit toujours ; il adaptait encore à ses expériences ou les théories vulgaires, ou quelques vues isolées que lui suggéraient les faits qu’il observait. Lavoisier, de son côté, ne le combattait qu’avec réserve, et ne proposait que dans des termes modestes les explications simples qui ressortaient de sa théorie. À peine pourrions-nous comprendre aujourd’hui qu’il se crût encore obligé de parler sur ce ton en 1780, cinq ans après qu’il avait démontré, pour tous les esprits non prévenus, l’insuffisance absolue de l’hypothèse du phlogistique, si nous ne voyions, en lisant les Mémoires et les rapports de ses confrères, qu’un autre langage n’eût pas été

  1. Le premier des Mémoires de M. Berthollet, sur l’Acide tartareux, est imprimé dans le Journal de Physique de 1776, tom. VII ; mais il ne paraît pas avoir été soumis à l’Académie.