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HOMBERT DE LA TOUR DU PIN

un de ceux-ci ; le jeune homme y mit un ton léger, l’autre fut un peu grognon ; cela n’alla pas très loin. Toutefois, par réflexion, Hombert conçut quelque scrupule. Le lendemain matin, il entra chez son père et lui raconta exactement ce qui s’était passé ; seulement il eut soin, dans le récit, de faire jouer son propre rôle par Donatien de Sesmaisons, un autre de ses camarades. Il ajouta qu’il était chargé par lui de consulter son père sur la convenance de donner suite à cette affaire. Monsieur de La Tour du Pin l’écouta attentivement et lui répondit :

« Ma foi, ce sont de ces choses qu’on ne se soucie guère de conseiller.

— Vous pensez donc, mon père, qu’ils doivent se battre ?

— Cela n’est pas indispensable et, si Donatien avait servi, cela se terminerait tout aussi bien par une poignée de main ; mais il est tout nouvellement dans l’armée, le capitaine a beaucoup fait la guerre ; vous savez la jalousie qui existe contre vous autres. À la place de Donatien, je me battrais. »

Hombert quitta la chambre de son père pour aller écrire un cartel. La réponse ne se fit pas attendre. L’engagement était pris de se trouver à midi au bois de Boulogne.

Avant que la famille se réunît au déjeuner, Hombert annonça à son père qu’il était témoin de Donatien. Son trouble était visible. Il combla sa mère de caresses. Il insista pour qu’elle lui arrangeât elle-même sa tasse de thé. Elle s’y prêta, en riant de cette exigence. Sa sœur Cécile était dans l’habitude de le plaisanter sur l’importance qu’il attachait à une certaine boucle de cheveux retombant sur son front ; elle entama cette taquinerie de famille :