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MORT D’UNE PRINCESSE D’ORLÉANS

« Vous en connaissez de toutes les couleurs », me dit le duc de Damas.

— Oui, répondis-je, ceux qui se proclament les serviteurs du Roi ; et ceux qui le servent en effet. »

Il était si bête qu’il me fit une mine de reconnaissance ; mais la duchesse me lança un regard furieux et ne me l’a jamais pardonné.

La famille d’Orléans, dont les formes affables et obligeantes faisaient un contraste si marqué à celles de la branche aînée, n’assistait pas à ce bal, autant qu’il m’en souvient. Elle était dans la douleur. La petite princesse, née en Angleterre, était à toute extrémité et mourut, en effet, peu de jours après.

La mort frappait à la fois à deux extrémités de la maison de Bourbon. Le vieux prince de Condé achevait en même temps sa longue carrière en invoquant vainement la présence de ses enfants pour lui fermer les yeux. J’ai déjà dit la vie qui retenait monsieur le duc de Bourbon sur les trottoirs de Londres.

Madame la princesse Louise se refusa également à adoucir les derniers moments de son père, prétendant ne pouvoir quitter sa maison du Temple où elle s’était cloîtrée, quoique toutes les autorités ecclésiastiques l’y autorisassent et que le cardinal de Talleyrand, archevêque de Paris, allât lui-même la chercher. Ce sont de ces vertus que je n’ai jamais pu ni comprendre, ni admirer.

Monsieur le prince de Condé mourut dans les bras de madame de Rouilly, fille naturelle de monsieur le duc de Bourbon ; elle lui prodigua les soins les plus filiaux et les plus tendres.

Monsieur le duc de Bourbon arriva quelques heures après la mort de son père : il parut fort malheureux de n’avoir pu le revoir, et d’autant plus que le vieux prince