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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome IV 1922.djvu/312

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MORT DE LA DUCHESSE DE WURTEMBERG

On avait craint que l’arrivée inopinée de monsieur le duc de Nemours n’effrayât la princesse ; mais il est toujours facile de tromper un malade : on la lui expliqua, sous un prétexte quelconque. Elle accueillit son frère avec joie et ne lui parut pas aussi mal qu’il le craignait.

Elle se leva et passa trois heures à dessiner avec lui. Ce récit contribua à rassurer ici ; l’illusion fut complète. Les réceptions du jour de l’an eurent lieu comme de coutume.

Cependant, les lettres de monsieur le duc de Nemours devinrent de moins en moins satisfaisantes. Celle reçue le jeudi 3 janvier parut si alarmante qu’elle inspira à la Reine le plus vif désir de partir et, simultanément au Roi celui de la retenir, persuadé qu’elle n’arriverait plus à temps.

Elle répondit à cette objection que déjà on l’avait opposée au départ de monsieur le duc de Nemours et qu’il était depuis quinze jours au chevet du lit de sa sœur.

Le Roi ne fit plus de difficultés. L’ordre fut donné de préparer à Toulon un bateau à vapeur pour transporter la Reine à Livourne d’où elle gagnerait facilement Pise, sans traverser d’autres États, et le télégraphe appela la reine des Belges qui devait accompagner sa mère.

Le départ fut fixé au lundi. La reine Louise arriva le dimanche ; mais les nouvelles étaient tellement mauvaises que le voyage fut contremandé le lundi même et, le mardi, monsieur Molé eut la douloureuse mission d’annoncer la mort.

La Reine s’écria : « Mon Dieu ! vous avez un ange de plus, mais j’ai perdu ma fille. » Et elle courut s’enfermer dans la chapelle d’où le Roi seul eut le crédit de l’arracher au bout de quelques heures.

Malgré son grand courage, sa rare piété, son admi-