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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome IV 1922.djvu/93

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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

Tout le monde se plaça sur le grand balcon pour voir arriver monsieur le duc d’Orléans. Lui et son cheval étaient littéralement portés par les flots du peuple. Je sais bien que cet enthousiasme ne signifie rien pour le lendemain ; mais, sans y attacher autrement d’importance, on doit constater qu’il y en avait beaucoup pour lui, là et dans ce moment. Sa pauvre femme en fut fort attendrie ; ce lui fut une douce compensation à ce qu’elle souffrait d’ailleurs.

Monsieur le duc d’Orléans, se débarrassant enfin de cette foule, rentra dans le Palais, où elle n’était guère plus choisie, et parvint dans la salle où nous étions.

Il s’y arrêta un moment, embrassa ses plus jeunes enfants arrivés de Neuilly depuis qu’il était sorti, parla au général Sébastiani, me dit quelques paroles obligeantes en me prenant la main, et rentra dans son cabinet particulier suivi de sa femme et de sa sœur. Celle-ci n’y demeura pas fort longtemps. En en sortant, elle me prit sous le bras et me dit : « Venez, je suis prête à partir. » Nous regagnâmes son appartement.

Survint l’embarras de la toilette. Elle avait bien un chapeau de paille, mais sans voile, et le voile était de rigueur pour notre expédition. Le mien étant de grand deuil ; je ne pouvais le lui donner. Elle sonna la seule femme qui l’eût accompagnée de Neuilly, mais elle n’avait aucune clé des armoires. Elle se rappela enfin un chapeau resté à Paris et garni d’une grande blonde ; on l’apporta. Mademoiselle craignait qu’il ne fût trop remarquable. Je l’assurai que les rues étaient remplies de toilettes tout aussi élégantes ; bientôt elle-même en fut frappée et aussi étonnée que je l’avais été les jours précédents.

Nous descendîmes le petit escalier de la tourelle et