CHAPITRE vi
Quoique, pendant les années qui s’étaient écoulées entre ces fêtes dont je viens de parler, les deux sociétés de l’ancien et du nouveau régime fussent habituellement séparées, elles se rencontraient chez les ambassadeurs et chez les étrangers. Je me rappelle avoir vu toute la Cour impériale à un très magnifique bal donné par la duchesse de Courlande. Elle s’était établie à Paris à l’occasion du mariage de sa fille cadette avec le comte Edmond de Périgord. Je ne sais si la passion de la duchesse de Courlande pour le prince de Talleyrand a précédé ou suivi cette union.
Madame Edmond, devenue un personnage presque historique sous le nom de duchesse de Dino, était, à peine au sortir de l’enfance, excessivement jolie, prévenante et gracieuse ; déjà la distinction de son esprit perçait brillamment. Elle possédait tous les agréments, hormis le naturel ; malgré l’absence de ce plus grand des charmes de la jeunesse, elle me plaisait beaucoup. Sa mère, toute occupée de ses propres aventures, avait laissé le soin de son éducation à un vieux professeur jésuite qui en avait fait un écolier très accompli et très instruit.