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ANECDOTE SUR M. DE MAUREPAS

dre les conseils de sa tante Adélaïde, lui écrivit pour lui demander à qui il devait confier le soin de ce royaume qui lui tombait sur les bras. Madame Adélaïde lui répondit que monsieur le Dauphin n’aurait pas hésité à appeler monsieur de Machault. On expédia un courrier à monsieur de Machault.

Nouveau billet du Roi : Que fallait-il décider pour les funérailles ? quelles étaient les étiquettes ? à qui s’adresser ? Réponse de madame Adélaïde : Personne n’était plus propre par ses souvenirs et ses traditions que monsieur de Maurepas à se charger de ces détails. Le courrier pour monsieur de Machault n’était pas encore parti. La terre de monsieur de Machault est à trois lieues au delà de Pontchartrain, par des chemins alors affreux. On le chargea de remettre en passant la lettre pour monsieur de Maurepas.

Le vieux courtisan, ennuyé de son exil, arriva immédiatement. Le Roi l’attendait avec impatience ; il le fit entrer dans son cabinet. Pendant qu’il s’entretenait avec lui, on vint avertir que le conseil était assemblé. L’usage voulait que chaque ministre fût averti chaque fois par l’huissier. Le manque de cette formalité fermait l’entrée du conseil ; c’était l’équivalent d’un renvoi. L’huissier du conseil, voyant monsieur de Maurepas dans cette intimité avec le nouveau Roi et sachant qu’il avait été mandé, le regarda en hésitant ; le Roi ne dit rien, mais se troubla. Monsieur de Maurepas salua comme s’il avait reçu le message ; le Roi passa sans oser lui dire adieu. Monsieur de Maurepas suivit, s’assit au conseil et gouverna la France pendant dix ans.

Lorsque monsieur de Machault arriva, quelques heures après, la place était prise. Le Roi lui dit quelques lieux communs, lui adressa des compliments et le laissa repartir. Madame Adélaïde s’affligea, se plaignit, mais