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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome V 1923.djvu/128

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CHUTE DE LA MONARCHIE D’ORLÉANS

mieu, ne buvant que de l’eau pure, en furent les premières atteintes, aussi bien que le prince de Joinville. On recommanda le changement d’air. Les malades furent transportés à Richmond.

Mesdames de Montjoie et de Dolomieu, se trouvant mal établies, préférèrent revenir à Claremont. Elles ne tardèrent pas à succomber l’une et l’autre, ainsi que monsieur Vatout et plusieurs personnes de la domesticité. Tout le monde souffrait plus ou moins.

L’éveil fut enfin donné sur la nature des eaux ; on ne tarda pas à reconnaître combien elles étaient dangereuses.

Les jeunes princesses et leurs enfants avaient été préservés par l’habitude de prendre une grande quantité de lait, servant de contre-poison. Monsieur le duc de Nemours aussi bien que le Roi, buvant principalement de la bière, semblaient y avoir échappé.

Je n’oserais affirmer cependant que ce poison n’ait pu influer, d’une façon latente, sur l’état de marasme et de consomption qui emporta le Roi, au mois d’août de 1850.

On travailla immédiatement à Claremont pour rétablir la salubrité des eaux ; mais l’impression était faite. La famille royale a toujours considéré ce séjour, où tant de convenances la retenaient, comme aussi malsain que triste.

L’état de la Reine et du prince de Joinville avait cessé de s’aggraver, mais en restant fort précaire. Toutefois, l’un et l’autre, ayant été enlevés à temps à l’effet du poison, se rétablirent lentement.

Je recueillis ces tristes détails, en apprenant, avec une véritable douleur, la mort de deux femmes avec lesquelles j’étais liée depuis plus de trente ans.

Les communications, sans être proscrites, n’étaient pas alors aussi faciles qu’elles l’ont été depuis. Ces calamités du foyer domestique, ajoutées aux calamités royales, ren-