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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome V 1923.djvu/206

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CORRESPONDANCE

m’intéresse le plus… mais elle s’est évaporée pour donner lieu à une autre de beaucoup la plus raisonnable qui serait que monsieur de Boigne allât seul à Copenhague terminer ses affaires, et qu’il revînt me prendre ici où je l’attendrais. Je me passerais fort bien de voir Copenhague. — J’ignore si monsieur de Boigne mettra ce projet à exécution mais j’en doute. — À présent, cher papa, vous savez quel doit être mon sort, c’est-à-dire que vous ne savez rien. Ce qui m’étonne, c’est que je ne m’ennuie pas beaucoup ici : j’ai rappris tout l’Art poétique par cœur ; enfin je m’occupe et, si j’avais pu me procurer un maître d’allemand, je ne regretterais pas mon séjour, mais toute la ville de Nyborg ne fournit pas un homme qui parle français et allemand. Du reste, depuis que je suis dans ce pays, je n’ai pas appris à dire un mot et je crois que j’y passerais dix ans sans faire le moindre progrès, à moins de m’y livrer entièrement pendant quelque temps comme j’aurais pu le faire en ce moment, surtout si monsieur de B. va seul à Copenhague, puisqu’il ne peut guère être absent moins de quinze jours et que ce temps, uniquement employé à connaître les principes de la langue du pays où l’on se trouve, doit suffire à donner beaucoup de facilité. — Je sollicite monsieur de B. d’écrire à Copenhague pour qu’on m’envoie mes lettres, s’il y en a pour moi. — Êtes-vous aussi sans nouvelles ? Mon Dieu que je vous plains !


Vendredi 24.

Monsieur de Boigne me paraît décidé à partir demain si les vents le permettent. Alors, notre séjour ici tiendra lieu de celui que j’aurais fait à Copenhague et je ne le regrette pas du tout. Si je vivais comme un animal sociable, je pourrais assez m’amuser des différentes per-