Page:Mémoires du Baron Haussmann, tome 1.djvu/190

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assurer l’exécution ? Et ma curiosité de géologue et d’hydrologue, elle-même, ne me servait-elle pas à bien expliquer mes courses fréquentes dans les montagnes ; mes ascensions aux points les plus élevés de la grande chaîne ; mes recherches et mon inspection de toutes les brèches accessibles ? On me voyait, en effet, aussi souvent escorté, dans ces excursions, par l’Inspecteur des Eaux et Forêts ou par un Ingénieur, que par le Capitaine des Douanes ou le Lieutenant de Gendarmerie, et je profitais de tous les prétextes que me fournissaient des intérêts locaux, pour me faire accompagner par les Maires des communes ayant ces hauteurs dans leurs territoires.

Des droits d’usage et de dépaissance soulevaient incessamment des débats entre ces magistrats et l’administration des Eaux et Forêts, qui prenait aussi beaucoup de peine à régler au mieux l’emploi des eaux d’arrosage, objet constant de discussions entre les intéressés.

Je note ici, comme un fait curieux que m’apprit l’inspecteur, un jour que nous traversâmes successivement de superbes forêts de sapins et de hêtres, provenant, à l’État, d’anciennes abbayes, que, d’après des titres de propriété remontant à 400 ans, certaines forêts de sapins étaient alors peuplées de hêtres, et réciproquement, que certaines forêts de hêtres avaient été garnies de sapins, ce qui semblait indiquer une loi d’alternance séculaire de ces essences entre elles, soit, d’assolement naturel des terrains forestiers ! — Je constate quelque chose d’analogue dans les landes de Gascogne, où le chêne noir succède graduellement au pin maritime, son avant-garde.