Page:Mémoires du Baron Haussmann, tome 1.djvu/198

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entre les deux mers, leurs eaux pluviales et le produit de la fonte de leurs neiges. Au bout de la courbe qu’elle décrit, la Maladetta, frappée des rayons du soleil du matin, nous apparut dans toute sa massive et splendide majesté.

Quand nous eûmes regagné la frontière, à plus de onze heures, nous nous reposâmes une demi-heure, à l’ombre d’un rocher, pour déjeuner sommairement. Déjà passablement fatigués, nous pensions, du moins, avoir fait le plus difficile. C’était une erreur, bientôt dissipée.

Lorsque nous en vînmes à l’exécution du second article de notre programme : la prise à revers de la base méridionale du pic du mont Vallier, sillonnée d’arêtes rocheuses et de ravins formant autant de précipices, ce fut bien autre chose. Les bâtons ferrés ne se trouvaient pas de trop pour assurer nos pas sur certains escarpements semés de pierres roulantes, et pour nous aider à gravir et surtout à descendre, presque à pic, les frayés de chèvres dont nous devions suivre tous les caprices.

Nous étions exténués, trempés de sueur ; avec les pieds meurtris, ampoulés ; bras et jambes moulus, quand, vers la fin de la journée, ayant enfin tourné le pic et dégringolé, par le ravin auquel nous tendions, jusqu’au chemin descendant à Conflens, du port d’Aula, nous nous sentîmes, pour la première fois depuis le matin, sur un sol praticable. Cela nous rendit la force de gagner notre confortable gîte.

La seconde expédition dont il me reste à parler, fut bien plutôt une promenade qu’une tournée de service ;