Page:Mémoires du Baron Haussmann, tome 1.djvu/208

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

patois ! » disait-il, avec dédain, « c’est tout au plus si j’en comprends la moitié. »

Je le chargeai de conduire à petites journées, en prenant la voie la plus directe, passant par Lombez, Auch et Condom, mes deux juments de selle, à Nérac, où je me rendis par Toulouse et Agen.

On venait de réaliser pour moi, dans le canton de Houeillès, l’acquisition, projetée depuis quelque temps, de propriétés importantes où je comptais utiliser, comme poulinières, ces deux jolies bêtes, et où, déjà, mes juments de voiture avaient été conduites.

Après une rapide visite de ces propriétés, faite avec mon beau-frère, M. Henri de Laharpe, alors en vacances, nous rentrâmes tous deux à Bordeaux, où je restai quelques jours avec les miens.

Le Cabinet Thiers venait de faire place à celui du 29, qui devait avoir une si longue durée, sous la présidence de M. Guizot. M. de Résumat rendit le portefeuille de l’intérieur à M. le comte Duchâtel. Quelle allait être ma situation vis-à-vis de celui-ci ? Je résolus d’aller à Paris, pour le lui demander nettement.

Il me reçut tellement bien que, tout d’abord, j’en éprouvai quelque appréhension. — « Méfiez-vous des « hommes gras, » m’avait dit le docteur Ferrus. — Mais, je m’aperçus bientôt que mon Ministre, plutôt bouffi que gras, me parlait sincèrement. D’ailleurs, pourquoi se serait-il donné la peine de m’abuser ?…

Oubliait-il ma lettre incongrue ? Ne parvint-elle au Ministère qu’après son départ ? Mes amis du Personnel la mirent-ils de côté ? Mystère. Quoi qu’il en fût, au fond, M. Duchâtel, d’un esprit essentiellement pratique