Page:Mémoires du Baron Haussmann, tome 2.djvu/9

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« Un des prédécesseurs de M. Haussmann s’était illustré pour avoir percé la rue Rambuteau. Pour lui, il fit, en dix ans, plus qu’on n’avait fait en un demi-siècle. Il démolit des quartiers ; on pourrait dire : des villes entières. On criait qu’il nous donnerait la peste ; il laissait crier et nous donnait, au contraire, par ses intelligentes percées, l’air, la santé et la vie. Tantôt, c’était une Rue qu’il créait ; tantôt, une Avenue ou un Boulevard ; tantôt, une Place, un Square, une Promenade. Il fondait des Hôpitaux, des Écoles, des groupes d’Écoles. Il nous apportait toute une rivière. Il creusait des égouts magnifiques. Il élevait des Casernes, des Théâtres. Il tirait de leur néant les Champs-Élysées, le Bois de Boulogne, le Bois de Vincennes. Il achevait les Halles Centrales. Il généralisait l’usage du Gaz ; il multipliait les lignes d’Omnibus ; il jetait sur la Seine les Bateaux qui l’animent, et qui facilitent la circulation. Il introduisait, dans sa belle Capitale, les arbres et les fleurs. Il la peuplait de Statues. Son Œuvre était au moins aussi fantastique que ses Comptes. Nous ne souhaitons qu’une chose à présent : c’est qu’on achève, par la liberté, ce qui a été commencé par le despotisme. »

Chacun pourra juger, au cours de l’Exposé qui va suivre, de tous les éléments de la Transformation complexe glorifiée, sans réserves, dans ce magnifique langage, si mes Comptes, dont les résultats pouvaient sembler alors, à des esprits superficiels ou prévenus, les produits de rêves éveillés ou de conceptious fantaisistes, n’étaient