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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/354

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MÉMOIRES DU GÉNÉRAL DE MARBOT.

entièrement les huit bataillons russes ! Tout fut tué ou pris ; le champ de bataille faisait horreur… Jamais on ne vit une charge de cavalerie avoir des résultats si complets. L’Empereur, pour témoigner sa satisfaction aux cuirassiers, ayant embrassé leur général en présence de toute la division, d’Hautpoul s’écria : « Pour me montrer digne d’un tel honneur, il faut que je me fasse tuer pour Votre Majesté !… » Il tint parole, car le lendemain il mourait sur le champ de bataille d’Eylau. Quelle époque et quels hommes !

L’armée ennemie, qui, du haut des plateaux situés au delà de Landsberg, fut témoin de la destruction de son arrière-garde, se retira promptement sur Eylau, et nous prîmes possession de la ville de Landsberg. Le 7 février, le général en chef russe Benningsen, étant bien résolu à recevoir la bataille, concentra son armée autour d’Eylau et principalement sur les positions situées en arrière de cette ville. La cavalerie de Murat et les fantassins du maréchal Soult s’emparèrent de cette position, après un combat des plus acharnés, car les Russes tenaient infiniment à conserver Ziegelhof qui domine Eylau, comptant en faire le centre de leur ligne pour la bataille du lendemain ; mais ils furent contraints de se retirer de la ville. La nuit paraissait devoir mettre un terme au combat, prélude d’une action générale, lorsqu’une vive fusillade éclata dans les rues d’Eylau.

Je sais que les écrivains militaires qui ont écrit cette campagne prétendent que l’Empereur, ne voulant pas laisser cette ville au pouvoir des Russes, ordonna de l’attaquer ; mais j’ai la certitude que c’est une erreur des plus grandes, et voici sur quoi je fonde mon assertion.

Au moment où la tête de colonne du maréchal Augereau, arrivant par la route de Landsberg, approchait