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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/398

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MÉMOIRES DU GÉNÉRAL DE MARBOT.

ordonna qu’il serait dressé une liste de tous ceux qui, venant de faire volontairement la campagne, n’appartenaient à aucun des corps de l’armée, ni à l’état-major des cinq maréchaux qui devaient les commander. Je fus donc inscrit sur cette liste, certain d’avance que l’Empereur, dont j’avais porté les dépêches, me désignerait de préférence à des officiers inconnus. En effet, le 9 juillet, l’Empereur me fit appeler, et, me remettant de volumineux portefeuilles, ainsi que des dépêches pour le roi de Saxe, il m’ordonna de me rendre à Dresde et de l’y attendre. L’Empereur devait quitter Tilsitt ce jour-là, mais faire un très long détour pour visiter Kœnigsberg, Marienwerden et la Silésie. J’avais donc plusieurs jours d’avance sur lui. Je traversai de nouveau la Prusse, revis plusieurs de nos champs de bataille, gagnai Berlin et arrivai à Dresde deux jours avant l’Empereur. La cour de Saxe savait déjà que la paix était faite, qu’elle élevait son électeur au rang de roi et lui concédait le grand-duché de Varsovie ; mais on ignorait encore que l’Empereur dût passer à Dresde en se rendant à Paris, et ce fut moi qui en portai l’avis au nouveau roi.

Jugez de l’effet que cela produisit ! En un instant, la cour, la ville et l’armée furent en émoi pour se préparer à faire une magnifique réception au grand empereur, qui, après avoir si généreusement rendu la liberté aux troupes saxonnes prises à Iéna, comblait son souverain de bienfaits !… Je fus reçu à merveille ; on me logea au château, dans un charmant appartement, où j’étais servi magnifiquement. Les aides de camp du Roi me montrèrent tout ce que le palais et la ville avaient de remarquable. Enfin l’Empereur arriva, et, selon l’usage que je connaissais déjà, je m’empressai de remettre les portefeuilles à M. de Méneval, et fis demander les ordres