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la préparation allemande

Il convient maintenant de dire ce que nous savions de la force allemande et des intentions de nos adversaires.

En 1912, on admettait généralement que l'armée allemande mobilisée comprendrait : 23 corps d'armée actifs, et 3 corps d'armée de nouvelle formation ; en outre, un certain nombre d'unités de réserve, 6 divisions de place forte, et 11 divisions de cavalerie.

En réalité, une lourde inconnue a plané jusque vers le 25 août 1914 sur le nombre, la formation, et le mode d'emploi des unités de réserve allemandes.

Le plan de mobilisation allemand mis en vigueur le 1er avril 1914 précisait qu'en principe les troupes de réserve seraient employées dès le début des hostilités aux mêmes tâches que les troupes actives ; de ce fait, il prévoyait la formation de corps d'armée de réserve engendrés par des corps d'armée actifs.

Jusque-là, nous avions été convaincus que les Allemands ne demanderaient à leurs troupes de réserve que des besognes secondaires, dans les mêmes conditions d'ailleurs que nous comptions employer les nôtres. « Pas de pères de famille en première ligne, » avait affirmé Guillaume II. Et ces paroles avaient été répétées, en juin 1913, au Reichstag.

Ces paroles impériales paraissaient d'accord avec les théories en honneur à cette époque dans l'armée allemande qui faisait reposer le succès sur la violence brutale du premier choc. Nous étions donc fondés à admettre que nos adversaires ne confierait pas le sort des premières rencontres à des troupes manifestement inférieures.

Le nouveau plan de mobilisation allemand éveilla en nous un doute quand il parvint à notre connaissance. Mais, en considérant que les corps d'armée de réserve étaient dotés d'une artillerie réduite, nous inclinions encore, à la veille de la guerre, à croire que ces corps d'armée, suivant en deuxième ligne, ne seraient utilisés qu'au siège des places fortes, à la garde des communications, à la tenue de fronts passifs, ou à l'occupation des territoires conquis.

Il importe de le dire : cette erreur que nous avons com-