Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/156

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
144
mémoires du maréchal joffre

que quelques jours après la mobilisation, quand les choses se dessinent, car il ne peut prendre corps que peu à peu, d'après les renseignements, tant diplomatiques que militaires, qui parviennent à partir de la mobilisation. Or, il y avait dans notre situation politique trop d'inconnues, de même en ce qui concernait les plans allemands. L'essentiel, c'est d'avoir à ce moment ses troupes prêtes, réunies dans un dispositif qui permette toutes les solutions. La concentration était donc, à mon avis, à considérer comme un dispositif initial de nos forces en vue de la réalisation de tout plan d'opérations ; ce ne pouvait donc être un dispositif arrêté ne varietur. Il fallait une concentration suffisamment souple pour permettre toutes les manœuvres et combinaisons possibles, Celles-ci, bien entendu, devaient être méditées et préparées par le général en chef, car, en raison de la proximité et de la grandeur des masses en présence, il était nécessaire que le commandement ait préparé au moins dans ses grandes lignes sa manœuvre de façon à ne pas être pris au dépourvu, le but étant non d'atteindre des objectifs géographiques, mais de joindre l'ennemi dans des conditions déterminées. D'ailleurs, la période intensive des transports allemands ne commençant que le septième jour de la mobilisation, on ne pouvait compter recevoir avant le dixième ou le onzième jour au plus tôt des renseignements susceptibles de fournir une opération. Donc, à moins de vouloir rester dans une attitude défensive et d'en courir tous les dangers, nous étions dans la nécessité, sans attendre ces renseignements, d'arrêter un plan moyen avec des variantes suffisamment souples pour jouer au reçu de ces renseignements. Un plan d'opérations préconçu était également rendu impossible par l'inconnue que représentait pour nous la Belgique.

C'est pour toutes ces raisons qu'il n'y a jamais eu de plan d'opérations écrit. D'ailleurs, personne n'avait à m'en demander compte.

Le plan d'opérations est, en effet, essentiellement l'oeuvre personnelle du général en chef. Jamais aucun plan d'opérations