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Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/35

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mémoires du maréchal joffre

au point moyenne des débarquements. Les études de transports en chemin de fer que j'avais poursuivies alors que j'étais directeur de l'arrière m'avaient convaincu qu'il était possible de manœuvrer nos chemins de fer avec assez de souplesse et de varianter facilement, le moment venu, nos débarquements ; si, par exemple, pour des raisons de politique que j'étais obligé de prévoir, la décision de mobiliser était prise avec quelque retard, je pouvais me trouver dans la nécessité de reculer mes débarquements ; j'estimais la chose facile grâce à la souplesse à laquelle était parvenu notre service des chemins de fer. Si, au contraire, je décidais de prendre l'offensive avant l'achèvement des débarquements, je considérais qu'il me serait possible de suivre nos avant-gardes en prolongeant mes lignes de transports, et de rattraper ainsi une ou deux journées de marche. Si enfin des renseignements me parvenaient avant la fin des transports stratégiques, j'admettais que je pourrais varianter les derniers transports pour préparer une autre manœuvre.

Grâce à ces différentes mesures, nous étions parvenus à réduire la disproportion numérique qui existait à notre désavantage, et nous avions acquis une grande souplesse dans nos manœuvres initiales. Mais il apparaissait que nous aurions à supporter, quoi qu'il arrive, le poids principal des armées allemandes, aussi longtemps que les armées russes ne prendraient pas elles-mêmes l'offensive. Pour faire échouer les intentions allemandes, pour rétablir en faveur de la Triple-Entente l'équilibre des forces, pour nous permettre de nous libérer d'une attitude purement défensive, le plus sûr moyen était d'obtenir de nos alliées russes un effort intensif.

Le général Dubail partit au mois d'août pour la Russie ; son voyage fut fécond en résultats ; après ces entrevues avec le tsar et l'état-major russe, il obtint que la mobilisation et la concentration seraient activées dans toute la mesure du possible, et qu'en tout cas on n'attendrait pas que cette concentration soit achevée pour agir. L'offensive serait prise dès que les forces de première ligne seraient