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Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/57

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mémoires du maréchal joffre

révélé 42 000 armes un peu fatiguées, et 40 000 seulement hors d'usage. C'était peu de chose sur l'approvisionnement total d'environ 3 millions de fusils. Les armes en parfait état, soit 2 millions et demi, étaient seules affectées aux formations de première ligne. Il était donc exagéré de conclure que notre armement avait un urgent besoin d'être remplacé. Sans doute il ne réalisait pas les derniers perfectionnements comme arme portative, mais il était encore suffisant et son infériorité sur le fusil allemand ne justifiait pas les 465 millions qu'aurait coûté la mise en service d'un nouveau fusil.

Si maintenant nous considérons l'armement de l'artillerie, nous constatons que notre artillerie de campagne était au complet et en bon état. Mais l'approvisionnement en minutions était insuffisant : depuis 1906, il avait été progressivement augmenté jusqu'au chiffre de 1 280 cartouches par pièce. Il fallait au moins arriver à 1500 ; il fallait, en outre, prendre des mesures pour préparer la mobilisation des établissements industriels susceptibles d'alimenter en temps de guerre cet approvisionnement par une production intensive. La plupart de nos établissements étaient hors d'état de réaliser cette condition, et d'importants crédits étaient nécessaires pour cela.

Il en faudrait d'autres pour la constitution de notre artillerie lourde. Les Allemands disposaient, en effet, de pièces de gros calibre dans chacun de leurs corps d'armée ; ils avaient, en outre, des équipages légers de siège. En France, nous n'avions fait que peu d'efforts pour les suivre, et notre situation à cet égard était inquiétante. Le Rimailho (155 T. R.) n'existait qu'en faible proportion : le nombre des batteries prévues était seulement de quarante-deux, chaque batterie n'ayant que deux pièces. Il me parut que les progrès à réaliser pour améliorer cet état de choses devraient s'effectuer en deux périodes. Pendant la première, il faudrait recourir à des moyens de fortune, en utilisant les pièces de 120 et 220 comprises dans les équipages de siège ou l'armement des places. Dans la seconde, il s'agirait de substituer progressivement à ce matériel provisoire