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Page:Mémoires inédits de l'abbé Morellet tome 2 1882.djvu/16

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heurs en expiation : quel homme ne pardonnerait à sa mémoire ?

Le poison dont il s’est servi paraît avoir agi doucement, et sans causer de douleur ni de convulsion. Le chirurgien, appelé pour constater la mort, déclara, dans le procès-verbal, que cet homme, qui n’était pas connu sous son vrai nom, était mort d’apoplexie ; le sang lui sortait encore par le nez.

L’archevêque de Sens avait usé d’un poison tout semblable. On avait tâché d’en procurer à son neveu le coadjuteur ; il ne lui est pas parvenu. Suard en a, et il me l’a montré : c’est une sorte de bol gros comme la moitié du petit doigt ; cela se brise en petits morceaux, et se fond dans la bouche…

Lorsqu’on suit pas à pas la carrière de ces grands acteurs de la révolution, qui ont changé notre gouvernement, pour nous donner, disaient-ils, la liberté, et qui nous ont fait acheter cette liberté prétendue au prix de tant de malheurs et de tant de sang, il est curieux d’observer quelles étaient leurs opinions dans un temps où l’esprit de parti leur laissait encore l’usage de leur raison. Voici comment s’exprime Condorcet dans un avertissement mis à la tête de l’Homme aux quarante écus, édition de Kell, t.  57, in-12 :

« Ceux qui ont dit les premiers que le droit de propriété dans toute son étendue, celui de faire de son industrie et de ses denrées un usage absolument libre, était un droit aussi naturel et surtout