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Page:Mémoires inédits de l'abbé Morellet tome 2 1882.djvu/23

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mer ; mais, loin d’écouter cette sollicitation dictée par leur reconnaissance, on en fit un nouveau crime au malheureux seigneur de Brienne, qui avait, disait-on, séduit, corrompu et avili ses anciens vassaux.

La fin tragique du comte me conduit à rapporter celle de son malheureux frère : traîné d’abord dans une prison de Sens, on l’avait ensuite, à la fin de février 1794, remis chez lui, avec des gardes qui ne le perdaient point de vue. Son frère vient de Brienne le voir : là il est arrêté, et l’on arrête en même temps l’archevêque, les trois Loménie, ses neveux, dont l’un son coadjuteur, et Mme de Canisy, sa nièce. L’archevêque est indignement traité par les exécuteurs de cet ordre, venant du comité de sûreté générale. Le lendemain, son frère, partant avec des commissaires pour voir mettre les scellés à Brienne, entre dans sa chambre et le trouve mort. On dit qu’il s’était empoisonné pendant la nuit avec du stramonium et de l’opium combinés. Les exécuteurs des ordres du comité, ajoutant encore à la cruauté de leur mission, voulurent s’en prendre à son neveu, l’abbé de Loménie, de ce qu’ils ne pouvaient l’amener vivant à Paris ; ils prétendirent que l’archevêque avait dû ne rien cacher à son neveu, et, chose incroyable, si la révolution française n’avait pas épuisé tous les genres de barbarie, ils forcèrent l’abbé de Loménie d’assister à l’ouverture du cadavre et de signer le procès-verbal.

Telle a été la fin de cet infortuné, suivie de celle