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Page:Mémoires inédits de l'abbé Morellet tome 2 1882.djvu/49

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lon, qui, interrogé par quel moyen on pourrait écarter plus sûrement toute injustice de la république à laquelle il donnait des lois, répond : Si chaque citoyen ressent l’injure faite à un autre, aussi vivement que celle qu’il éprouve lui-même. » J’avais combattu Palissot, Linguet, sans autre intérêt que celui du bon sens ; j’ai défendu les enfans des proscrits sans autre intérêt que celui de la justice et de l’humanité.

Mais, après l’événement, quelques personnes, trompées peut-être par leur bienveillance pour moi, me disaient : « Il est impossible que tant d’enfans et d’héritiers de condamnés, qui recouvrent leurs biens, et un grand nombre des cinquante et cent mille livres de rente, ne fassent pas quelque chose pour le défenseur officieux qui a plaidé leur cause avec beaucoup de zèle et de succès. »

Je ne me prétais guère à cette espérance, lorsqu’un ami, M. de Vaisnes, vint m’avertir qu’elle n’était point chimérique, et m’apprendre qu’une femme de ses amies, Mme de Vergennes, épouse et fille de condamnés, s’occupait de me faire donner par quelques familles un témoignage durable de leur reconnaissance, et qu’on voulait m’acheter un petit bien de campagne qui en serait le monument.

M. de Vaisnes m’apprit cette nouvelle vers juillet 1795. En juin 1796, un an s’était écoulé sans qu’aucun effet eût suivi, lorsqu’un matin je vis