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Sa cravate était de soie claire, ou quelquefois en mousseline festonnée et brodée ; sa figure sans barbe ressemblait à celle d’une femme et avec cela une voix douce, mais douce ! aussi avait-il une clientèle très choisie. J’ai connu une vieille dame contrefaite qui se faisait habiller par lui parce que, en essayant ses corsages, il lui pinçait la taille d’une façon qui la chatouillait agréablement. Ce diable d’homme avait tous les vices, aussi commandait-elle robes sur robes,… tant pis pour le mari qui allait avec des habits râpés !… mais cela nous éloigne du bain de la comtesse, vous allez me dire ? Quel rapport y a-t-il entre un couturier et un bain ? Attendez, vous allez voir !

Mme de Piotti qui passait à bon titre pour une femme des mieux faites de Paris, un corps taillé dans du marbre rose et ciselé par le ciseau des sculpteurs antiques ! Madame de Piotti prenait donc un bain, de ces bains de coquettes, remplis de parfum, de lait d’iris enfin de tout ce qui fait que la peau se conserve belle, même après les fatigues d’une nuit de bal.

Elle éprouvait ce moment de bien-être que l’on ressent en laissant ses membres reposer dans l’eau bienfaisante et rêvait au