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ÉHOS.

I Pausanias, IX, 27.

sexes. De la fusion de ces deux principes générateurs résulte Hermaphro- dite, qui est, à mon avis, une des formes d’Éros, le désir accompli. Homère ne personnifie pas l’Amour; il le nomme deux ou trois fois comme un sentiment humain, mais non comme un Dieu. Au début de la Théogonie d’Hésiode, Éros est placé, parmi les principes du monde, après le Vide et la Terre « Il y eut d’abord le Vide et ensuite la Terre à la poitrine large, siège toujours sûr des Immortels qui occupent les crêtes de l’Olympe neigeux et les Tartares ténébreux, au fond du sol aux larges routes, puis le Désir, qui l’emporte sur tous les immortels, le Désir énervant, qui, dans le sein de tous les Dieux et de tous les hommes, dompte la pensée et la volonté réfléchie. i> Au reste, il ne reparaît plus dans la suite du poëme, si ce n’est quand, après la naissance d’Aphro- dite, Éros et Himéros, c’est-à-dire le Désir et le Charme, s’attachent à ses pas. Éros était la divinité locale de Thespies, ville de la Béotie près de laquelle habitait Hésiode, ce qui explique pourquoi il lui donne une place importante au commencement de son poëme. D’après Pausanias’, le plus ancien simulacre d’Éros, chez les Thespiens, était une pierre brute. Avant la naissance de l’art, on représentait généralement les Dieux de cette manière, principalement Hermès, dont le nom est devenu un terme générique pour désigner ces images primitives.

Les bornes des champs, les poteaux indicateurs du chemin dans les carrefours étaient naturellement consacrés à Hermès, Dieu des routes etdes limites. La sculpture naquit par le passage du symbole à l’image, lors- qu’on tailla le haut du poteau en forme de boule ressemblant grossière- ment à une tête. En outre, comme Hermès était le Dieu du gain et de la fécondité, celui qui multipliait les fruits dans les vergers et les troupeaux dans les étables, on rappelait ce caractère, si précieux pour les bergers et les cultivateurs, par un attribut dont la crudité ne choquait personne à ces époques naïves et qui pouvait s’appliquer également à Dionysos, générateur des fruits, ou à d’autres divinités champêtres primitivement étrangères à la religion grecque, comme le Phrygien Prièpos, ou le Ver- tumnus des peuples de l’Italie.

La puissance créatrice étant représentée, dans les religions orien- tales, par des divinités androgynes, on peut supposer que l’Hermaphro- dite est un emprunt fait par les Grecs à quelque mythologie asiatique. Les auteurs anciens n’en parlent pas; la petite anecdote de Salmacis, racontée par Ovide, ne suffit pas pour expliquerla répétition fréquente de ce type singulier dans les monuments de l’art, et presque toujours avec