Page:Ménard - Du polythéisme hellénique, 1863.djvu/334

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rien ne justifie l’opinion qui les représente comme une classe de mandarins lettrés, méprisant les croyances du peuple. S’il y a eu en Grèce des philosophes qui ont méconnu la profondeur et la haute portée morale de la religion de leur patrie, cela tenait à la tournure particulière de leur esprit, à leurs tendances théocratiques et monarchiques, et nullement à l’enseignement des mystères. Non seulement cet enseignement n’était pas en opposition avec le reste de la mythologie, mais il était lui-même entièrement symbolique, sans aucune espèce de démonstration ni d’explications. Chacun le comprenait à sa manière ; dans les histoires de dieux morts et ressuscités qui faisaient le fond de tous les cultes mystiques, les Evhéméristes croyaient voir une preuve que les dieux n’étaient que des mortels divinisés ; pour d’autres, comme Cicéron, ces symboles empruntés à la vie de la nature semblaient éclairer plutôt la nature des choses que celle des dieux ; mais la plupart étaient surtout frappés, comme Plutarque, des allusions à la vie morale de l’âme.

« L’opinion d’Aristote, dit Synésios, est que les initiés n’apprennent rien, mais qu’ils reçoivent des impressions, qu’ils sont mis dans une certaine disposition à laquelle ils ont été préparés. »

Telle est, en effet, la nature de l’enseignement religieux ; il ne s’adresse pas à la raison comme l’enseignement philosophique, mais à toutes les facultés de l’homme à la fois ; il agit par les sens sur l’imagination, sur le cœur et sur l’intelligence. Les grands mystères de la nature, la lumière, le mouve-