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précédente en font une langue de savants, d’érudits, de lettrés fins et délicats, et le placent de beaucoup au-dessus du niveau intellectuel de la majorité du monde civilisé qui tenterait de l’employer comme langage universel.

Mais il y a une autre raison plus profonde qui milite contre son adoption. Le latin, — même si l’on ne tient aucun compte de sa difficulté — langue morte d’une civilisation disparue, ne peut convenir aux idées, ni aux besoins journaliers de la vie moderne. Le philosophe, le lettré et le théologien seraient donc les seuls à l’employer décemment, et c’est un peu sommaire, vu le nombre des professions évoluant dans le sillage du xxe siècle. Mais à supposer que, malgré tant d’obstacles, on se décide à adopter le latin, comment exprimer dans le langage de Cicéron, ou même en basse latinité, des phrases comme les suivantes : « Ma correspondance de tramway est dans la poche du gilet de mon complet veston. » — « Le bureau de tabac est dans la gare du chemin de fer près du kiosque aux journaux », ou cette autre d’un usage plus courant : « Garçon, un bock et la cote de la Bourse ! »

On pourrait en citer des milliers du même genre.

Le latin ne peut donc plus convenir aux besoins de notre civilisation ; il devrait subir de trop gran-