Page:Mérejkowsky, Hippius, Philosophoff - Le Tsar et la Révolution, 1907.djvu/147

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sirait être Pierre : il suivait en cela, jusqu’au bout, la tradition byzantine de l’Empire romain d’Orient, au profit de l’autocratie russe. Malgré lui, il dut briser la statique orientale par la dynamique occidentale.

Mais pourtant, il fit tout ce qui dépendit de lui pour subordonner cette nouvelle dynamique à l’ancienne statique dans son principe central — l’unité absolue de l’orthodoxie et de l’autocratie — afin d’asservir l’être libre de l’Occident, de prendre en lui les formes sans le contenu, la lumière sans le feu, la chair sans l’âme. Il obtint quelque chose de semblable aux papillons conservés sous un globe de verre, ou au royaume de la princesse endormie : tout être vivant entrant dans ce royaume, s’endort d’un sommeil enchanté, le mouvement devient immobilité. La princesse endormie, c’est la culture européenne ; son tombeau de cristal, c’est l’autocratie orthodoxe.

Mais Pierre, malgré tout, ne fit pas ce qu’il voulut. Le monde est créé de telle sorte que le mouvement y est plus fort que l’immobilité, la dynamique plus forte que la statique : toutes les princesses endormies se réveillent. L’infime levure européenne fit monter la pâte moscovite. L’équilibre fut rompu. La partie ajoutée au bâtiment ne correspondait plus aux fondations et