Page:Mérejkowsky, Hippius, Philosophoff - Le Tsar et la Révolution, 1907.djvu/218

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

briser le dernier lien qui le joint à lui ; mais il ne le peut et de nouveau y retourne, s’y attache, le fixe toujours plus attentivement comme s’il attendait quelque chose de lui, comme s’il pensait qu’il y a dans le Christ un mystère indéchiffrable pour lui.

« Toute ma vie Dieu m’a tourmenté », dit un des héros de Dostoiewski.—Toute ma vie le Christ m’a tourmenté, pourrait dire Rosanov. — Chaque fois qu’il est prêt à le renier irrévocablement, au moment suprême il entend l’appel connu et lointain : Saul ! Saul ! pourquoi m*persécutes-tu ? Il t’est difficile de regimber contre l'aiguillon.

En sa pensée il « regimbe contre l’aiguillon », nie et hait le Christ, mais en son cœur il est attiré irrésistiblement vers lui et il semble, je le répète, qu’il va tomber à ses pieds en s’écriant : Seigneur, mon Dieu !

Toute parole et tout blasphème prononcés par les hommes contre le Fils de l'homme leur seront pardonnes — cela n’est-il pas dit surtout pour les apostats comme Rosanov ?

Certes, ce qu’il fait, il ne le fait pas en son nom, ni par sa volonté. Il ne fait pas cela lui-même autant que cela se fait en lui. Voilà pourquoi peut-être le châtiment ne retombera pas sur lui, mais sur ceux qui l’ont induit en faute. L’apostasie de Rosanov, conséquence fatale de tout