Page:Mérejkowsky, Hippius, Philosophoff - Le Tsar et la Révolution, 1907.djvu/284

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un profond abîme entre les conducteurs et ceux qui les suivent, surtout si les premiers, comme nous l’observons souvent, restent trop loin de la psychologie des seconds et décident arbitrairement de ce que ces derniers peuvent concevoir et de ce qu’ils ne peuvent pas concevoir. Ainsi s’établissent des rapports, peu rassurants et nuisibles, entre ceux « d’en haut » et ceux « d’en bas ». Nous avons tous le sentiment de l’importance de la propagande révolutionnaire en Russie. Et c’est précisément parce que la propagande est chose sainte, nécessaire et juste — qu’il est particulièrement pénible de voir qu’elle est parfois stérile.

Sommes-nous bien sûrs que la révolution « par en bas » est proche, que, grâce à la propagande sociale de ces derniers temps, les paysans ne croient déjà plus que le tsar peut leur donner de la terre ou que leur foi est moins profonde qu’au temps de Stéphanovitch ? De soulèvement populaire contre le tsar (en prenant le mot populaire en un sens très large), il n’y en a pas encore eu un seul. Quant aux émeutes contre les représentants de l’autorité et les propriétaires, il y en a eu de tout temps ; et non seulement elles ne signifient pas la négation de l’autocratie, c’est-à-dire, du tsar, mais, au contraire, signifient leur affirmation.

« Notre peuple, dit Bakounine, hait profondément