Page:Méric - À travers la jungle politique et littéraire, 2e série, 1931.djvu/15

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cris de révolte ou de pitié n’allaient point sans ironie. L’Ironie, dont Proudhon a dit qu’elle était sainte, c’est l’arme souveraine. Cela vaut cent fois mieux que les jérémiades ou les rugissements. Tous les grands révoltés l’ont cultivée. Vallès, avec âpreté et cruauté, parfois. D’Axa, avec plus de désinvolture. Silence aux pleurnichards et aux hypocondriaques. Nous sommes au pays de Voltaire.

D’Axa avait, à côté de lui, comme collaborateurs, des écrivains qui se nommaient : Octave Mirbeau, Lucien Descaves, Paul Adam, Georges Darien (l’auteur de Biribi), Victor Barrucand (alors anarchiste et qui devait lancer l’idée du Pain gratuit), Émile Henry (qui, lui, lança la bombe de Terminus) et des poètes : Stuart-Merill, Francis Viellé-Griffin, Henri de Régnier… D’autres encore, dont Pierre Veber (mais oui !). Une merveilleuse équipe.

L’influence de ce journal-revue fut prodigieuse. D’Axa y dépensait une verve intarissable et amorçait des campagnes retentissantes. En même temps il faisait preuve d’une fantaisie que rien ne pouvait troubler. C’est ainsi qu’un jour il écrivait un article violent et justicier contre la stupidité malfaisante du duel pour, le lendemain, aller se battre contre son collaborateur Darien, avec lequel il n’était point d’accord sur je ne sais quel détail philosophique. Il octroyait un coup d’épée à l’auteur de Biribi, puis lui réclamait une chronique pour le numéro suivant du journal.

Mais au-dessus de tout, il affirmait bellement, superbement, sa foi dans la Révolte, son désir de vie libre et vagabondante, hors des « rivets de la loi ».

On le classa comme anarchiste. On se trompait. D’Axa a toujours refusé de s’embrigader. Il s’opposait violemment aux « compagnons » qui l’entouraient et lui repro-