Page:Méric - À travers la jungle politique littéraire, 1930.djvu/271

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des élections du Var et de Clemenceau. L’ancien ministre, enfoui dans son fauteuil, la calotte sur son crâne, tout menu, tout ratatiné, souriait :

Et il prononça :

— Clemenceau, c’est évidemment une force… Il aurait pu faire de grandes choses. Le malheur, c’est qu’il lui a toujours manqué ça.

En même temps, il mettait la main sur son cœur.

Jugement à méditer. Seulement, si Clemenceau manquait de cœur, il n’a jamais manqué d’estomac. Et me voici au bout. Mon père, en dépit de toutes les pressions amicales, refusa obstinément les situations qu’on lui offrait. Il vécut quelque temps dans le Var, puis revint à Paris. Il traversa la guerre tant bien que mal, avec tous ses enfants au front.

Dans ses dernières années, il était définitivement dégoûté de la politique, et lorsque je revins, démobilisé, je le trouvai aussi résolument antimilitariste et pacifiste que je l’étais moi-même.

Il mourut, deux ans après l’armistice.

Il mourut pauvre, comme il avait vécu, après avoir eu cent fois l’occasion de s’enrichir.

C’est à peine si l’on trouva, chez lui, quelques assignats.