bouleversant volume de grand reportage ne pourrai-je lancer à la tête des confrères médusés ! J’entrevois la gloire, la fortune. Une seule ombre à ce tableau enchanteur, Juliette !… La reverrai-je jamais ? Dépouillée de toute énigme, réduite à son simple rôle d’instrument entre les mains du petit vieux, elle me paraît moins attirante… Je me consume à évoquer la sirène dans son éblouissante nudité ; je reconstitue la lascivité de ses abandons, la perversité de ses attitudes, nos duos érotiques… Je me retourne, haletant sous les morsures de ce démon femelle, en proie à l’obsession de la chair, rué dans la farandole des paroxysmes. Succube ! Succube ! bondie de je ne sais quel brûlant pandémonium, avec quel effroi et quelles délices n’ai-je point, toute volonté éteinte, sacrifié sur ton autel de feu. Et voici que, maintenant, rien ne s’émeut en moi ; mon sang circule avec calme dans mes veines apaisées. Tout sortilège est dissipé. Est-ce le régime qu’on m’impose qui m’arrache à l’envoûtement ? Sont-ce toutes ces histoires de glandes, et de cellules, et d’opérations qui m’ont immunisé ?
J’ai comme un avant-goût de la béatitude où nagent les victimes d’Ugolin, si toutefois… Et, soudain, je me prends à rire tout haut dans ma cellule. Curieuses associations d’idées et de réminiscences. Je viens de penser à Voltaire, ce Dieu des mécréants, cette béquille de la raison défaillante. Une phrase de Candide danse dans ma mémoire. C’est la phrase que, désespérément, jette un eunuque sur le corps d’une femme endormie ! O che sciagura d’essere senza coglie ! Quel malheur, en effet ! Quelle malédiction que de se voir ainsi amputé, surtout