Page:Méric - Le Crime des Vieux, 1927.djvu/49

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Ma montre marquait près de cinq heures, ou dix-sept heures, si vous préférez. De congé, je n’étais venu au journal que pour ce coup de téléphone qui, à mon gré, tardait trop. Pour tromper mon impatience, je me rapprochai de mes deux fabricants de vers autour desquels quelques rédacteurs facétieux s’arrondissaient en cercle. Un instant, amusé, j’écoutai :


farigoulis. — Toute poésie doit être diaphane et fluide ; le vers exprime l’inexprimable, le flou, l’indécis. Le poète s’affranchit de la réalité, plonge dans les régions inaccessibles ; il baigne dans les ondes du psychisme !

coquelicot. — La poésie n’est que l’expression de la réalité profonde. Le vers ne s’envole pas ; il pénètre. Le vers doit être dissocié, morcelé comme les choses mêmes.

farigoulis. — Pardon ! L’indispensable eurythmie…

coquelicot. — Fadaises. La poésie est en tout. L’enclume du forgeron, vibrante d’étincelles, est une symphonie. On ne définit point les choses. On les souligne.

farigoulis. — La poésie, c’est l’envol, l’âme qui s’effeuille dans l’univers.

coquelicot. — La poésie, c’est le choc brutal, contre l’âme, de la sur-réalité.

farigoulis. — Je dis, dans la Revue Super-psychoformiste

coquelicot. — Je publie, dans la Revue du Double Cosmos, oh ! un court poème, fait entièrement de sensations vibratoires. Voulez-vous me consentir l’amabilité de l’intégrer dans vos méninges ?