Page:Méric - Le Crime des Vieux, 1927.djvu/81

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on n’aurait osé imaginer situation aussi burlesque et aussi tragique. C’est « shakespearien » ripostait Farigoulis, l’auteur des « Petits Chichis ».

Pourtant et quoi que je pus dire, ces deux disparitions à des intervalles aussi rapprochés me tracassaient. Je n’ignorais point qu’il existe une mystérieuse loi présidant à des sortes de contagions. Nous qui sommes, en qualité de journalistes, des observateurs méticuleux des grands et petits faits sociaux, restons persuadés qu’il sévit, à certaines périodes, de véritables épidémies. J’ai vu, durant des mois entiers, la rubrique de suicide alimentée avec une telle abondance qu’on finissait par se demander si la chose n’était pas dans l’air, si la fréquence de ces suicides ne provenait pas d’une forme de névrose déterminée par quelque microbe inconnu. D’autres fois, s’accumulaient les rixes et les coups de couteau qui se succédaient avec une rigueur mathématique. Des fugues de jeunes prêtres pouvaient parfaitement assumer ce caractère de répétition classique. Et, cependant je ne sais par quelle bizarre intuition, mêlant les cambriolages des banques aux escapades des hommes de Dieu, j’étais harponné par une hypothèse que je m’efforçais en vain de rejeter, tant elle me paraissait absurde. Je tentais, malgré moi, de rattacher ces deux catégories de faits, d’ordre si différent, à une seule et même cause.

Il me fallait reconnaître qu’à cette période de mon existence, l’absence persistante et intolérable de Juliette dont j’avais obtenu, pourtant, des témoignages vibrants de fougueuse passion, agissait terriblement sur mon esprit et sur ma volonté. Je sombrais, lente-