Page:Méric - Le Crime des Vieux, 1927.djvu/83

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me heurtai à des grappes d’imbéciles qui ne devinaient rien du drame qui se jouait en moi. Mais je cherchai sans résultat. Le couple s’était évanoui. Les nerfs crispés, frémissant à la fois de colère et d’espoir, je revins lentement sur mes pas. Et alors je la reconnus. C’était bien Elle… Les bras ballants, stupide, incapable du moindre geste, je la vis, Elle, Juliette, s’élancer souple et rieuse dans un taxi dont la portière se referma d’un claquement sec. La voiture fila et tourna dans une rue avant même que j’eus compris exactement ce qui venait de se produire.

Je me laissai tomber, accablé, à la terrasse d’un café. Ah ! la femme ! la femme ! Être éternel de perfidie. Abîme de ruses et de mensonges ! Je m’étais si fortement persuadé qu’elle m’appartenait sans réserves, qu’il ne pouvait exister, pour elle, d’autre homme, d’autre amant… Misérable aventurière !

Je crois bien que je fus tout près de sottises irréparables. Je songeai, sérieusement, à la mort. Par bonheur je ne suis fait que de velléités et d’imagination et, chez moi, il est rare que l’acte suive la pensée. Je passai une nuit de fièvre, rôdant sans but dans Paris, et, bêtement, je bus plus qu’il ne fallait. Il en résulta, le lendemain, une lassitude extrême. J’étais brisé physiquement et, sous le poids de cet accablement, les incidents qu’on me signalait me parurent dénués de toute espèce d’intérêt.

Ils avaient, cependant, leur importance, ces deux minces faits-divers fleuris dans la même journée. Il ne s’agissait rien de moins que d’une nouvelle et double disparition. Deux jeunes prêtres enlevés ou en fuite,