« Et moi, monsieur le président, je savais très bien que je devais être vendu, parce que je me suis dit : « Pourquoi veut-il marcher à dix mètres devant moi, puisque tout à l’heure nous irons ensemble à la gare et que nous reviendrons ensemble ? »
« Alors, je l’ai suivi sur la route. Il a marché tout le temps à dix mètres devant moi.
« Il faisait un beau soleil. Moi qui avais toujours envie de mourir, je me disais : « Que cela serait beau de mourir par un beau soleil comme celui-là ! »
« Vous comprenez, monsieur le président, je n’avais qu’une idée : c’était de me faire oublier, qu’on ne parle plus de moi et que je puisse me refaire une existence.
« Et toujours on me représentait comme un chef de bande ! On disait : « La bande à Carouy ».
« Si j’avais été un chef de bande, j’aurais eu de l’argent sur moi. Je n’avais que cent francs quand on m’a arrêté.
« Quand nous sommes arrivés devant la gare, j’ai vu d’abord une automobile qui stationnait dans le village. Puis celui qui me logeait s’est précipité et a traversé la gare.
« Alors, moi, je me suis arrêté à la porte…
« J’ai vu sur un banc quatre hommes qui étaient assis… Ils étaient habillés comme les « ouvriers » en casquette que j’avais aperçus à Fresnes. À côté de la porte, il y avait un homme avec un faux col.