Page:Méric - Les Bandits tragiques.djvu/7

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dire aux hommes d’aujourd’hui : « Vous savez, il y a là-bas, de l’autre côté des mers, un infortuné qui connaît les pires tortures morales, un innocent jadis sacrifié, jeté en pâture à l’épouvante générale, un pauvre diable d’homme qui a famille, enfants, et crève de ses illusions… Alors, quand vous tenez ce langage aux braves gens, vos contemporains, vous les voyez hocher la tête, esquisser un geste las et murmurer :

— Ah ! oui Dieudonné !… le bandit tragique… Erreur judiciaire… Bah ! il y a tant d’innocents, tant d’innocents de par le vaste monde…

Remuer toute cette mer d’indifférence égoïste, ce n’est pas tâche aisée…

Peut-être le film y parviendrait-il, au fond des quartiers populaires… peut-être le roman-feuilleton avec des « à suivre » pleins d’à-propos… Mais de la simple prose humaine, sans littérature, sans afféterie, de la prose jaillie du cœur, trouble et banale, comme la vie… des pages douloureuses et sans emphase, semées de maladresses et de puérilités comme celles qui contiennent les souvenirs de ce malheureux…

N’importe, il faut qu’on sache.

Depuis plus de douze années, un homme dont le seul crime fut d’avoir opté pour un idéal peut-être inaccessible, d’avoir rêvé de bonté, de fraternité, de liberté, expie férocement, sordidement,