Page:Mérimée, Lettres à une inconnue 2,1874.djvu/171

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très-mauvais état. Je suis tout à fait remis à présent ; mais je souffre d’un lumbago que j’ai gagné à ramer sur le lac.

J’attends de vos nouvelles impatiemment ; mais je crains que ce ne soit un peu de ma faute. Je vous avais promis que je vous écrirais si je quittais Fontainebleau. Que voulez-vous ! on ne fait rien ici, et cependant on n’est jamais libre. Tantôt on m’appelle pour courir les bois, tantôt pour faire une version. Le temps se passe surtout à attendre ; c’est la grande philosophie du pays que de savoir attendre, et j’ai de la peine à faire mon éducation sous ce rapport. Notre grande attente en ce moment est celle des ambassadeurs siamois, qui viennent jeudi. On dit qu’ils se présenteront à quatre pattes, selon l’usage de leur pays, rampant sur les genoux et les coudes. Quelques-uns ajoutent qu’ils lèchent le parquet, saupoudré de sucre candi à cet effet. Nos dames s’imaginent qu’ils leur portent des choses merveilleuses. Je crois qu’ils n’apportent rien du tout et qu’ils espèrent emporter beaucoup de belles choses.

Je suis allé à Alise mercredi dernier avec l’em-