Page:Mérimée, Lettres à une inconnue 2,1874.djvu/48

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ce qui m’a rendu horriblement malade. Je me suis fait une théorie médicale à mon usage, qui en vaut une autre : c’est qu’il me faut de la lumière. Dès que le temps est brouillé, je souffre ; lorsqu’il pleut, je suis tout patraque. Enfin, le soleil est revenu et je suis sur pieds. C’est pendant le mauvais temps que la nouvelle altesse impériale[1] a passé la mer. Elle était chez nous (la mer) bruyante en diable et ressemblait à l’Océan. Je pensais à ce que devait souffrir cette pauvre princesse, mariée de la veille, et embarquée pour la première fois, ayant la perspective d’un discours de maire en écharpe à son débarquement. Ne trouvez-vous pas qu’il vaut mieux être bourgeois à Paris ? Je voudrais l’être à Cannes. Ma maison est en avant de l’hôtel de la Poste. Mes fenêtres donnent sur la mer et je vois les îles de mon lit. Cela est délicieux. J’ai une trentaine de croquis plus ou moins mauvais, mais qui m’ont amusé à faire. Vous en aurez plusieurs à votre choix, si vous choisissez bien, sinon au mien. Les amandiers sont en fleurs dans tous les

  1. La princesse Clotilde venait d’épouser le prince Napoléon.