Page:Mérimée - Carmen.djvu/138

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m’appelle Arsène Guillot, G, U, I, deux L ; il m’écrit par un Y !

— Je le disais bien, un infidèle ! s’écria le docteur. On ne voit que cela. Bah ! bah ! ma belle, oubliez celui-là. Un homme sans mémoire ne mérite pas qu’on pense à lui. — Il tira sa montre. — Quatre heures ? dit-il en se levant ; je suis en retard pour ma consultation. Madame, je vous demande mille et mille pardons, mais il faut que je vous quitte ; je n’ai pas même le temps de vous reconduire chez vous. — Adieu, mon enfant ; tranquillisez-vous, ce ne sera rien. Vous danserez aussi bien de cette jambe-là que de l’autre. — Et vous, madame la garde, allez chez le pharmacien avec cette ordonnance, et vous ferez comme hier.

Le médecin et la garde étaient sortis ; madame de Piennes restait seule avec la malade, un peu alarmée de trouver de l’amour dans une histoire qu’elle avait d’abord arrangée tout autrement dans son imagination.

— Ainsi, l’on vous a trompée, malheureuse enfant ! reprit-elle après un silence.

— Moi ! non. Comment tromper une misérable fille comme moi ?… Seulement il n’a plus voulu de moi… Il a raison ; je ne suis pas ce qu’il lui faut. Il a toujours été bon et généreux. Je lui ai écrit pour lui dire