Page:Mérimée - Carmen.djvu/276

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Lorsqu’il se réveilla, il était nuit, la lune éclairait sa chambre. Il regarda l’heure ; il était trois heures moins un quart. Il n’avait plus envie de dormir. Il était assis sur son lit et pensait à la vieille comtesse.

En ce moment, quelqu’un dans la rue s’approcha de la fenêtre comme pour regarder dans sa chambre, et passa aussitôt. Hermann y fit à peine attention. Au bout d’une minute, il entendit ouvrir la porte de son antichambre. Il crut que son dentschik[1], ivre selon son habitude, rentrait de quelque excursion nocturne ; mais bientôt il distingua un pas inconnu. Quelqu’un entrait en traînant doucement des pantoufles sur le parquet. La porte s’ouvrit, et une femme vêtue de blanc s’avança dans sa chambre. Hermann s’imagina que c’était sa vieille nourrice, et il se demanda ce qui pouvait l’amener à cette heure de la nuit ; mais la femme en blanc, traversant la chambre avec rapidité, fut en un moment au pied de son lit, et Hermann reconnut la comtesse !

— Je viens à toi contre ma volonté, dit-elle d’une voix ferme. Je suis contrainte d’exaucer ta prière. Trois — sept — as — gagneront pour toi l’un après l’autre ; mais tu ne joueras pas plus d’une carte en vingt-quatre heures, et après, pendant toute ta vie, tu ne joueras

  1. Soldat, domestique d’un officier.