Aller au contenu

Page:Mérimée - Carmen.djvu/283

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Hermann montra un sept.

Il y eut un ah ! général. Tchekalinski était évidemment mal à son aise. Il compta quatre-vingt-quatorze mille roubles et les remit à Hermann, qui les prit avec le plus grand sang-froid, se leva et sortit aussitôt.

Il reparut le lendemain à l’heure accoutumée. Tout le monde l’attendait ; les généraux et les conseillers privés avaient laissé leur whist pour assister à un jeu si extraordinaire. Les jeunes officiers avaient quitté les divans, tous les gens de la maison se pressaient dans la salle. Tous entouraient Hermann. À son entrée, les autres joueurs cessèrent de ponter dans leur impatience de le voir aux prises avec le banquier, qui pâle, mais toujours souriant, le regardait s’approcher de la table et se disposer à jouer seul contre lui. Chacun d’eux défit à la fois un paquet de cartes. Tchekalinski mêla et Hermann coupa ; puis il prit une carte et la couvrit d’un monceau de billets de banque. On eût dit les apprêts d’un duel. Un profond silence régnait dans la salle.

Tchekalinski commença à tailler ; ses mains tremblaient. À droite, on vit sortir une dame ; à gauche un as.

— L’as gagne, dit Hermann, et il découvrit sa carte.